Les Pages orthodoxes et Ressources

Introduction au Paraclytique ou Grand Octoèque

par le père Denis Guillaume


La Mère de Dieu, symbole de l'Église

 


 Il s’agit ici de l’Introduction par le père Denis Guillaume à la première édition du Paraclitique ou Grand Octoèque, dont le premier tome est paru en 1977 et le deuxième en 1979. Cette Introduction ne figure pas à la deuxième édition en un seul volume, paru en 1995. On trouvera les notes, pour la plupart des définitions de termes liturgiques, à la fin du texte. Le Lexique du Spoutnik, Nouveau Synecdimos (1997), contient souvent des définitions plus complètes des termes liturgiques que celles qu’on trouve ici.

Le Paraclitique est le livre liturgique le plus employé dans les Églises byzantines: en effet si l’on retranche des cinquante-deux semaines de l’année les quinze semaines qui vont du début du Grand Carême au Dimanche de Tous les Saints et pour lesquelles on emploie successivement le Triode et le Pentecostaire, il reste trente-sept semaines (soit plus de deux tiers de l’année) pendant lesquelles le livre de base est le Paraclitique ou Grand Octoèque.

C’est sous ce nom que l’on désigne à présent les éditions imprimées du livre contenant toute l’hymnographie du cycle de la musique byzantine. L’expression Grand Octoèque se rencontre pour la première fois en 1837 pour distinguer ce livre de ce qu’on pourrait appeler le Petit Octoèque, celui de Jean Damascene, contenant seulement l’hymnographie du dimanche. En fait ce dernier livre s’est longtemps appelé Octoèque pour le distinguer à son tour de l’Octoèque monophysite de Sévère d’Antioche et d’un jeu des chasseurs de livres en honneur a la cour de Byzance mais vivement déconseillé aux âmes pieuses par un canon du sixième concile œcuménique. Quand l’un et l’autre de ces Octoèques furent effacés de la mémoire populaire, on put reprendre le terme pour designer notre livre. Dans l’intervalle, c’est sous le nom de Nouvel Octoèque qu’au 9e siècle Joseph l’Hymnographe désigne les huit semaines d’offices qu’il vient de composer, par opposition aux huit dimanches de l’ancien Octoèque. Vers le 14e siècle on donna en outre à ce livre le titre de Paraclitique à cause des offices d’intercession au Christ à la Mère de Dieu et aux Saints répartis sur les différents jours de la semaine.

La formation du Grand Octoèque fut l’œuvre de plusieurs générations d’hymnographes et s’échelonne entre les 7e et 11e siècles. De l’hymnographie antique il n’a gardé que les hypakoi, les kondakia et leurs iki, débris d’un ensemble plus vaste attribué par la tradition à Romain le Mélode (+ ap. 556). Quant aux anatolika, ces 64 stichères que l’on trouve en deuxième position au Lucernaire et aux Laudes de l’Octoèque dominical, on les dit de peu antérieurs à Jean Damascène et composés en tout cas avant le 7e siècle par des hymnographes qui, tout en conservant l’anonymat, auraient cependant, signé ainsi leur origine orientale.

Au 8e siècle s’élabore la partie la plus importante de l’Octoèque dominical. Sont attribués au Damascène (675-749) les 24 stichères alphabétiques aux apostiches des Grandes Vêpres du samedi et leurs 8 théotokia signés en l’acrostiche; les 8 canons anastasima des Matines du dimanche; un canon à la Mère de Dieu inséré dans les Matines du premier mercredi. D’autres pièces encore lui sont prêtées, mais pas de façon unanime par les diverses éditions.

À son confrère Cosmas l’Hagiopolite, moine de S. Sabas puis évêque de Maiouma en 735, la tradition attribue la paternité de trois canons stavroanastasima (tons 1, 7 et 8), tandis que les mêmes canons des tons 2, 3 et 4 sont attribués à Jean le Moine. Vers le milieu du 9e siècle, quand l’Orthodoxie triomphe de l’iconoclasme et que les monastères retrouvent la paix, le climat est favorable pour l’éclosion du Paraclitique.

Joseph l’Hymnographe (816-883), poursuivant l’œuvre de Jean Damascène, donne à chacun des six jours de la semaine les huit offices dont jusqu’alors l’Octoèque enrichissait le seul dimanche. Il compose lui-même 48 canons de ce nouvel Octoèque, à savoir: les canons catanyctiques du lundi et du mardi, les canons de la Croix du mercredi et du vendredi, les canons de S. Nicolas du jeudi et les canons des Saints du samedi. On lui doit en outre six canons en l’honneur du Précurseur (mardi de tous les tons sauf 3 et 8), un canon à la Mère de Dieu (mercredi du ton 8) et deux canons en l’honneur des Apôtres (jeudi des tons 7 et 8).

Neuf canons sont signés par Théophane le Marqué, métropolite de Nicée (778-845). Ce sont 4 canons pour les Anges (lundi des tons 1, 4, 5 et 6), 4 pour les Défunts (samedi des tons 2, 3, 5 et 8) et un canon à la Mère de Dieu (vendredi du ton 4). Une tradition plus généreuse lui en attribue trente-deux (1).

C’est aussi au 9e siècle que Métrophane de Smyrne compose les 8 canons triadiques pour le Mésonyktikon (Office de minuit) des dimanches. Au début du 10e siècle l’Octoèque dominical s’enrichit des derniers ajouts: les éothina de Léon VI le Sage, empereur de Byzance de 886 à 913, et les exapostilaires composés par son fils Constantin VII Porphyrogénète, empereur de 913 à 959. Au 10e siècle encore Paul d’Amorium écrit les huit séries de trois stichères en l’honneur de la Mère de Dieu qui se chantent à défaut de Ménée le samedi soir à la fin du Lucernaire et que seules les éditions slaves du Paraclitique nous ont conservés. Les ultimes remaniements dateraient du 11e siècle si l’on en croit l’attribution de trois canons en l’honneur de la Mère de Dieu (mercredi des tons 2 et 3, vendredi du ton 2) à Jean, métropolite d’Euchaites, dit Jean le Moine.

Après avoir donné un rapide aperçu historique de la formation du Paraclitique, nous voudrions en examiner le contenu. Dans la présente édition nous avons en effet réduit au minimum indispensable les titres et les rubriques, et c’est ici le lieu de préciser la place des hymnes dans l’office, leur usage et leur terminologie, pour ceux des lecteurs qui seraient moins familiers avec le rite byzantin.

Le livre du Paraclitique offre pour chaque jour l’hymnographie variable des offices de Vêpres, du Mésonyktikon (dimanche) et de l’Orthros, soit seulement trois offices sur sept, car à Complies, Prime, Tierce, Sexte et None la partie variable, fort réduite, est empruntée au Ménée. C’est par les Vêpres que commence la journée liturgique et dans le cycle hebdomadaire chaque jour, à partir de Vêpres, est rattaché à la commémoraison d’un mystère, d’un saint ou groupe de saints: le dimanche est consacré à la Résurrection du Seigneur, à la Croix, à la Mère de Dieu; le lundi aux Anges; le mardi au Précurseur; le mercredi et le vendredi à la Croix et la Mère de Dieu; le jeudi aux Apôtres et à S. Nicolas; le samedi aux Martyrs, à tous les Saints et aux défunts.

Les VÊPRES, qu’elles soient petites, grandes ou ordinaires, ont à peu près la même structure, au moins en ce qui concerne la partie hymnographique, qui se greffe sur le Lucernaire (2) et les versets des Apostiches Les Petites Vêpres se célèbrent le samedi soir si l’on doit faire l’agrypnie (4).

Au Lucernaire on a 4 stichères (5) pour les Petites Vêpres (3 anastasima dont on répète le premier) et 10 stichères pour les Grandes Vêpres (3 anastasima, 7 anatolika 7, 3 stichères du Menée (3) ou, à défaut, 3 stichères à la Mère de Dieu).

Aux Vêpres des jours ordinaires on a 6 stichères qui se présentent en deux groupes de trois dont le second sert à défaut de Ménée: dimanche soir, 3 stichères du Seigneur (despotika) et 3 des Incorporels (c.-à-d. des Anges); lundi, 3 despotika et 3 du Précurseur (Jean Baptiste); mardi, 3 de la Croix (stavrosima) et 3 de la Mère de Dieu (disons: théotokia); mercredi, 3 des Apôtres et 3 de S. Nicolas; jeudi, 3 stavrosima et 3 théotokia; vendredi, 3 despotika et 3 martyrika (9) ou thêotokia. Après l’hymne du soir (Lumière joyeuse) on chante le Prokimenon, sorte de répons bref, qui varie selon les jours de la semaine.

Aux Apostiches on a pour les Petites Vêpres 1 stichère anastasimon et 3 stichères de la Mère de Dieu accompagnant des versets choisis du Psaume 44; pour les Grandes Vêpres, 1 stichère anastasimon et 3 stichères alphabétiques du Damascène accompagnant des versets du Psaume 92.

Pour les Vêpres des jours ordinaires, du dimanche soir au jeudi soir, nous avons 2 stichères d’inspiration variable (dimanche et lundi: catanyctiques (10); mardi et jeudi: stavrosima; mercredi: apostolika) et 1 martyrikon, qui accompagnent la lecture du court Psaume 122. Le vendredi soir nous avons, selon les traditions locales et les occurrences liturgiques, un nombre variable de martyrika et de nékrosima (11) accompagnant des versets des Psaume 67 et 64. Le Tropaire (12) de Résurrection et son théotokion terminent les Vêpres du samedi soir. Les autres soirs on chante le tropaire du Ménée et le théotokion correspondant (voir Annexe 1). S’il y a une fête de Saint en occurrence avec le dimanche: tropaire de Résurrection, tropaire du Ménée et théotokion dominical du ton correspondant (13).

L’OFFICE DE MINUIT ou Mésonyktikon peut se célébrer chaque jour, mais seul l’office du dimanche possède un canon (11) appelé canon triadique puisqu’il est consacré à la sainte Trinité. Après l’hirmos 5, les strophes 1 et 2 sont précédées du refrain « Trinité sainte, notre Dieu, prends pitié et sauve-nous »; la strophe 3 est précédée de « Gloire au Père... », la strophe 4 ou théotokion est précédée de « Maintenant... » Dans les odes n’ayant que 3 strophes, on répète la première. Le nombre variable des strophes est conditionné par le nombre de lettres de l’acrostiche. Après la 3e et la 6e odes, le canon est interrompu par deux cathismes suivis de théotokion.

À l’ORTHROS ou office de Matines l’hymnographie intervient après l’Hexapsalme et la grande litanie de paix: si l’on chante « Le Seigneur est Dieu... », on enchaîne avec le tropaire apolytikion et son théotokion pris au Paraclitique le dimanche (voir Grandes Vêpres), au Menée les autres jours. Si par contre il y a Alléluia (carême et jours de jeûne), on chante les hymnes triadiques (voir Annexe 5). Après la lecture du Psautier (3 sections le dimanche, 2 le samedi; les autres jours 2 en été, 3 en hiver) on chante des compositions poétiques appelées cathismes16 en nombre correspondant aux lectures (17). Le dimanche, après le Psaume 118 et les evloghitaires ou tropaires de la Résurrection, on chante l’hypakoi (18), qui sert de 3e cathisme. Le dimanche encore les anavathmi (19) et le prokimenon (20) préparent la proclamation de l’évangile matutinal (21).

Après la prière « Sauve, Seigneur, ton peuple... », on commence à chanter les Canons. Le dimanche on a pour chaque ode 14 tropaires: 4 du canon anastasimon, 3 du canon stavroanastasimon (22), 3 de la Mère de Dieu et 4 du Saint du jour (23). Jadis les tropaires étaient intercalés entre les derniers versets de l’ode scripturaire et cet usage demeure encore au Mont Athos. Ailleurs on sépare les tropaires par de courts refrains: « Gloire, Seigneur, à ta sainte Résurrection » devant les tropaires 2 et 3 de l’anastasimon, « Gloire à toi, notre Dieu, gloire à toi » devant les tropaires 1 et 2 du stavroanastasimon, « Très-sainte Mère de Dieu, sauve-nous » devant les théotokia et les tropaires du 3e canon, « Saint (s) de Dieu, intercède(-édez) pour nous » devant les tropaires du 4e canon, Gloire au Père... et Maintenant... avant les deux derniers tropaires. Seul l’hirmos du premier canon est chanté; des autres hirmi on donne seulement l’incipit dans les éditions grecques, tandis que les éditions slaves en donnent tout le texte. Ici nous donnons l’incipit lorsque les hirmi appartiennent à une série facile à retrouver; sinon, nous suivons l’usage slave en donnant le texte complet de l’hirmos. Si l’hirmos n’est pas même indiqué par l’incipit, cela signifie que l’on continue sur le même hirmos. Les dimanches ordinaires, on chante à la fin des odes les catavasies de la Mère de Dieu ou bien celles de la grande fête despotique à venir.

En semaine on a aussi pour chaque ode 14 tropaires: 10 du Paraclitique (premier et deuxième canons) et 4 du Saint du jour (Ménêe). Comme les stichères du Lucernaire, les premier et deuxième canons se rattachent aux différents mystères répartis sur les jours de la semaine. Ainsi les premiers canons du lundi et du mardi sont catanyctiques, ceux du mercredi et du vendredi stavrosima, celui du jeudi consacré aux Apôtres, celui du samedi 4 aux Prophètes, Martyrs et à tous les Saints. Le deuxième canon est consacré: le lundi aux saints Anges, le mardi au Précurseur, le mercredi et le vendredi à la Mère de Dieu, le jeudi à S. Nicolas, le samedi aux Défunts.

De plus les tropaires 3 et 4 des odes du premier canon des lundi, mardi, mercredi et vendredi sont consacrés aux Martyrs. Les différents tropaires sont donc précédés des refrains suivants: pour les catanyctiques « Gloire à toi, notre Dieu, gloire à toi », pour les martyrika « Saints de Dieu (ou saints Martyrs), intercédez pour nous » (i.p.n.), pour les Incorporels « Saints Anges et Archanges, i.p.n. », pour le Précurseur « Baptiste du Seigneur, i.p.n. », pour les stavrosima « Gloire, Seigneur à ta sainte Crucifixion (ou à ta précieuse Croix) », pour les Apôtres « Saints Apôtres du Christ, i.p.n. », pour S. Nicolas « Saint Hiérarque du Christ, i.p.n. », pour les Prophètes, Martyrs etc. « Tous les Saints du Seigneur, i.p.n. », pour les Défunts « Fais reposer, Seigneur, les âmes de tes serviteurs », pour tous les théotokia « Très- sainte Mère de Dieu, sauve-nous ».

Le canon est interrompu après la 3e ode par le kondakion, l’ikos (24) et le cathisme du Saint du jour (Ménée), après la 6e ode par le kondakion et l’ikos du dimanche (Paraclitique). En semaine on dit après la 3e ode l’hypakoi et le cathisme du Saint du jour, après la 6e ode, le kondakion, l’ikos et le synaxaire du Ménée ou, à défaut, le kondakion du jour de semaine, par exemple celui des Anges le lundi. À la fin du canon, après la petite litanie (le dimanche après Saint est le Seigneur notre Dieu) nous avons l’exapostilaire ou le photagogikon (25): le dimanche, un des onze exapostilaires correspondant à l’évangile de Matines; en semaine, un des exapostilaires correspondant au jour de semaine; en carême ou les jours de jeûne, un des photagogika selon le ton occurrent. Le texte des exapostilaires et photagogika se trouve dans les Annexe 4 et 5.

Les Laudes du dimanche comportent 8 stichères dont 4 anastasima et 4 anatoliques, entre lesquels on intercale les versets du Psaume 150 et 2 versets choisis du Psaume 9. Après le « Gloire au Père... », on chante un des onze éothina (26) correspondant à l’évangile de Matines et, après « Maintenant... », le théotokion « Tu es toute bénie... » S’il y a une fête en semaine, on chante les stichères du Ménée.

Les jours ordinaires, après la lecture des Psaumes 148-150, la doxologie et la litanie de demandes, on chante les apostiches, qui ont la même structure que les apostiches des Vêpres: 2 stichères d’inspiration variable selon les jours de semaine, suivis de versets du Psaume 89, 1 martyrikon et le théotokion final.

Le Paraclitique donne enfin pour la LITURGIE de chaque jour une série de six tropaires (huit le dimanche) à intercaler entre les derniers versets des Béatitudes (27), selon une tradition qui ne s’est perpétuée qu’en de rares monastères. Le premier de ces tropaires, toujours le même tout au long de la semaine d’un même ton, sert d’hirmos ou de prokimenon.

Qu’on nous pardonne tous ces détails et ces rubriques! D’une part nous ne voulions pas en encombrer les pages de ce livre d’hymnes ni devoir les répéter chaque fois qu’il était nécessaire; et d’autre part nous ne souhaitions pas que notre traduction encourût le reproche d’être incomplète du point de vue liturgique. Certes nous aurions préféré montrer ici la signification spirituelle et la richesse théologique de ces offices, mais nous avons craint de redire des choses connues après les minutieuses introductions de Dimanche (28) et de La Prière des Heures (29) et notre introduction à Vêpres et Matines (30).

La présente traduction du Paraclitique a été élaborée à partir du texte grec de la Παρακλητική, ήτοι Οκώηχος η Μεγάλη éditée à Rome en 1855 et pour certaines variantes nous avons utilisé l’édition d’Athènes 1976 (Apostoliki Diakonia). Le texte slave de l’Oktoih, sirěč Osmoglasnik (éd. Saint-Synode, Moscou, 1896) nous a fourni les stichères de Paul d’Amorium aux Vêpres du samedi soir, lesquels manquent dans le texte grec. C’est aussi à l’instar de l’Octoèque slave que nous proposons un agencement des Vêpres du vendredi soir plus ordonné que dans les éditions grecques (31). Enfin c’est dans l’édition Rigopoulos, Salonique, 1967, que nous avons trouvé, au moins en grec, les rubriques les plus complètes. En ce domaine rien ne vaut la précision des livres slaves. C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles l’Octoèque slave se présente en deux grands volumes in-4°, tandis que le Paraclitique grec peut tenir en un seul volume in-8°, comme c’est le cas pour l’édition Φως (Athènes, 1959).

Pour le format de notre livre nous avons longuement hésité: les chœurs des monastères et paroisses auraient peut-être préféré une présentation plus spacieuse permettant de chanter à plusieurs autour du même lutrin; finalement nous avons du nous décider pour ce format de poche qui conviendra aux usages les plus variés.

La caractéristique de notre traduction est d’être orientée vers le chant, et en cela nous rejoignons l’intention primordiale des hymnographes byzantins, auteurs de ces poèmes sacrés destinés à être chantés dans les églises au cours des services divins.

Pour leur exécution, nous renvoyons à notre ouvrage intitulé Vêpres et Matines dans lequel nous avons déjà donné, avec l’ordinaire de ces offices, de nombreux exemples des huit modes de la musique byzantine. Dans la tradition musicale slave, adoptée ici parce qu’à la fois héritière du chant grec et plus proche de l’expression occidentale, chaque mode comporte une mélodie de stichère, une mélodie de tropaire et une mélodie d’hirmos.

À la mélodie de stichère correspondent les strophes du Lucernaire, des Laudes, les apostiches de Vêpres et de Laudes, les éothina (exemples dans Vêpres et Matines, p. 16-19, 29-43 et 146-149). À la mélodie de tropaire correspondent l’apolytikion (que nous appelons tout simplement tropaire), les hymnes triadiques, les cathismes, l’hypakoi, le kondakion, la plupart des antiennes des Anavathmi (32) et des tropaires des Béatitudes (33) (exemples dans Vêpres et Matines, p. 78- 85 et 126-129. Notons ici que les onze exapostilaires dominicaux se chantent sur le 2e ton de tropaire. À la mélodie d’hirmos correspondent les hirmi et toutes les strophes du Canon (exemples dans Vêpres et Matines, p. 106-125, 136-143, dans Carême et Semaine Sainte, passim, dans Pâques-Ascension-Pentecôte, p. 6- 34, 62-65, 73-83). Si tous ne peuvent pas s’offrir le plaisir de chanter ces hymnes, le lecteur solitaire goûtera cependant, du fait de la traduction rythmée, celui d’une lecture qui est déjà musique pour l’oreille ou l’esprit. Quant à nous, il nous eût semblé impensable de traduire sans musique un livre dont le titre même promet huit modes musicaux.

Puisse le lecteur y goûter également ce qu’une étymologie peut-être erronée nous fait attendre néanmoins de ce Paraclitique, à savoir la divine consolation! Et que les prières de la Mère de Dieu, la vertu de la précieuse Croix, la protection des Anges, l’intercession du Précurseur, des Apôtres et de tous les Saints nous aident à obtenir le salut et la miséricorde du Christ notre vrai Dieu!

Archidiacre Denis Guillaume


NOTES

1 J. Pargoire, L’Église byzantine de 527 à 847, Paris, 1905, p. 333.

2 Lucernaire: suite des psaumes 140, 141, 129 et 116 entre les derniers versets desquels on intercale 4, 6 ou 10 stichères selon qu’il s’agit de vêpres petites, ordinaires ou grandes.

3 Apostiches: série de 3 ou 4 stichères accompagnant des versets choisis de psaumes à la fin de tout office vespéral et de l’orthros des jours de semaine.

4 Agrypnie: office de toute la nuit comprenant: None, Petites et Grandes Vêpres, Litie, Artoclasie, Orthros, Prime et se terminant au matin par la Liturgie eucharistique.

5 Stichères: strophes intercalées entre les versets du Lucernaire, des Laudes et des Apostiches.

6. Anastasima: stichères de Résurrection.

7 Anatolika: stichères orientaux.

8 Menée: livre contenant mois par mois les parties propres aux fêtes fixes de l’année liturgique.

9 Martyrika: stichères en l’honneur des Martyrs.

10 Catanyctiques: stichères de componction.

11 Nékrosima: stichères consacrés aux défunts.

12 Tropaire dit Apolytikion parce que justement il termine l’office de vêpres (apolysis — congé).

13 Entre le tropaire, s’il n’y en a qu’un, et le théotokion on dit « Gloire au Père... Maintenant... » S’il y a plus d’un tropaire, on dit « Gloire au Père... » avant le dernier tropaire et « Maintenant... » avant le théotokion.

14 Canon: ensemble des 9 odes ou cantiques scripturaires reçus et canonisés pour l’emploi liturgique. La 2e ode ne se chante que pendant le Carême.

15 Hirmos: strophe bordée de guillemets et servant de modèle musical aux autres strophes.

16 Cathisme, du grec καθίζω, s’asseoir, désigne à la fois une des divisions du Psautier, elle-même divisée en 3 stances, et les tropaires qui suivent les lectures ou pendant lesquels on s’assied.

17 La dernière strophe d’un cathisme est toujours un théotokion. Dans l’usage slave ce théotokion est précédé de « Gloire au Père... Maintenant... », tandis que les strophes intermédiaires sont précédées de versets psalmiques. Dans l’usage grec, le dimanche on dit « Gloire au Père... » avant le second tropaire et « Maintenant... » avant le théotokion, alors qu’en semaine on dit « Gloire au Père... Maintenant... » avant le théotokion, sans versets psalmiques entre les tropaires.

18 Hypakoi signifie obéissance, soumission à la voix que l’on écoute; ici vraisemblablement: antienne, répons.

19 Anavathmi: ensemble de tropaires inspirés par les psaumes graduels ou psaumes des montées (119-133) et divisés en 3 antiennes (4 pour le ton 8) de 3 tropaires chacune. C’est en quelque sorte la montée vers l’Évangile.

20 Prokimenon: répons bref qui précède une lecture scripturaire: évangile à Matines, épître à la Liturgie, lecture biblique à Vêpres les jours de fête et en carême.

21 II y a onze péricopes évangéliques pour annoncer la Résurrection du Seigneur aux matines du dimanche.

22 Anastasimon: de la Résurrection; stavroanastasimon: de la Croix et de la Résurrection.

23 Si le canon du Saint a 6 tropaires par ode, on chante le canon anastasimon (4 tropaires), le canon de la Mère de Dieu (4 tropaires, en doublant le premier) et cela fait 14 tropaires en tout. Si le canon du Saint a 8 tropaires, on chante l’anastasimon (4 tropaires), le canon de la Mère de Dieu (réduit à 2 tropaires), ce qui fait encore 14 tropaires au total.

24 Kondakion et ikos sont à l’origine le prélude et la première strophe d’un poème qui pouvait en compter jusqu’à 24 et dont chaque strophe se terminait par le même vers.

25 Exapostilaire: ainsi nommé parce qu’on retrouve souvent dans ces pièces ou dans leur théotokion l’expression εξαπόστειλον envoie (ta lumière). Photagogikon exprime la même idée. En principe le canon de matines termine avec la nuit, la 9e ode exalte la Mère qui enfante la lumière, et l’exapostilaire correspond aux premières lueurs du jour naissant.

26 Éothinon (pl. éothina): stichère de l’aurore.

27 Les Béatitudes servent de 3e antienne à l’office des Typiques qui introduit la Liturgie des catéchumènes.

28 Dimanche, office selon les huit tons, Chevetogne, 1972.

29 La Prière des Heures, Ωρολόγιον, Chevetogne, 1975.

30 Vêpres et Matines, mélodies slaves et grecques, textes français, Chevetogne, 1972.

31 Le Paraclitique grec en effet présente trois systèmes différents aux vêpres du vendredi soir: a) pour les tons 1 à 4 on a au Lucernaire 3 despotika et 3 théotokia, aux Apostiches 3 martyrika et 1 nékrosimon; b) pour les tons 5 et 6: au Lucernaire 3 despotika et 3 martyrika, aux Apostiches 1 martyrikon et 2 nékrosima; c) pour les tons 7 et 8: au Lucernaire 3 martyrika et 3 despotika, aux Apostiches 1 martyrikon et 2 nékrosima.

32 Sur mélodie de tropaire nous avons les Anavathmi des tons 1, 4, 5, 6, 7. Pour les tons 2 et 3 nous avons dû suivre la mélodie de stichère. Pour le ton 8 (4e plagal) nous avons emprunté la mélodie spéciale du ton 4 (Vêpres et Matines, p. 96). Seules les Béatitudes des tons 4 et 6 suivent la mélodie de stichère qui s’accorde mieux à la structure des strophes.

 

  

Dernière modification: 
Jeudi 21 juillet 2022