Vie spirituelle

Introduction aux Pages du Mariage et de la Vie Chrétienne dans le Monde

Pages du mariage et de la vie chrétienne dans le monde


Icône de la Rencontre de Saint Joachim et Sainte Anne

La Rencontre de Saint Joachim et Sainte Anne
(Novgorod, Russie, XVIe siècle)

 


La Tradition de l’Église reconnaît deux grandes vocations ou voies, le monachisme et le mariage, par lesquelles les chrétiens sont appelés à connaître Dieu et accomplir l’appel du Seigneur : Soyez donc parfaits, de même que votre Père céleste est parfait (Mt 5, 48 ). Dans les écrits ascétiques, les moines sont souvent appelés des « anges terrestres » ou les « parfaits » ; ce sont les violents qui prennent le Royaume des Cieux de force (Mt 11, 12), qui vivent déjà à l’image de la vie future, le siècle à venir.

Est-ce à dire que ceux qui ne sont pas moines ou moniales sont condamnés à vivre un « christianisme à rabais », qu’ils ne peuvent accomplir la plénitude de la vie chrétienne, qu’ils ne peuvent aucunement répondre à l’invitation de Jésus : Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu possèdes, donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans le ciel. Puis viens, et suis-moi (Mt 19, 21). La grande masse des chrétiens n’étant pas des monastiques, doivent-ils se contenter d’un « christianisme de seconde classe », de n’être que des « touristes » parmi les « citoyens » du Royaume ?

Si la Tradition fait l’éloge de l’état monastique, en même temps elle souligne l’unité profonde et inséparable de la vocation en Christ de tous les baptisés. Écoutons saint Jean Chrysostome :

Quand le Christ, dit-il, ordonne de suivre la voie étroite, il s’adresse à tous les hommes. Le moine et le séculier doivent atteindre les mêmes hauteurs… Ceux qui vivent dans le monde, bien que mariés, doivent par tout le reste ressembler aux moines… Vous vous trompez tout à fait, si vous pensez qu’il est des choses exigées des séculiers et d’autres des moines... ils auront les mêmes comptes à rendre. (Homélie XX sur l’Épître aux Éphésiens)

De nos jours, Paul Evdokimov écrit : « C’est dans sa totale exigence que l’Évangile s’adresse à tous et à chacun ».

Nous voici donc face à la problématique : Si le chrétien dans le monde doit rencontrer les mêmes exigences évangéliques que le moine retiré du monde, comment peut-il y parvenir ? Le monde qui l’entoure, notre monde contemporain, s’éloigne de plus en plus des valeurs chrétiennes : au mieux, le monde manifeste une hostilité ouverte à l’égard du christianisme ; au pire, il lui est indifférent. Au mieux, hostilité, car le chrétien doit prendre conscience de sa foi, la vivre pleinement et en témoigner à sa manière, dans son milieu, à l’instar des martyrs des premiers siècles et des saints de tous les temps. Au pire, indifférence, le risque pour le chrétien étant de se voir glisser imperceptiblement dans un état de somnolence spirituelle où la foi n’occupe qu’une petite partie de sa vie – notamment à l’occasion de grandes fêtes, de mariages, de baptêmes etc. – mais pour le reste la foi n’est pas pertinente à sa vie, seules les valeurs du siècle, y compris les valeurs séculières les plus nobles (par exemple, les actions altruistes), comptent.

Comment alors le chrétien dans le monde, face à l’Évangile qui ne se compromet pas et n’envisage pas de demi-mesures, doit-il vivre sa foi ? La première réponse se trouve dans la distinction faite par le Christ : ceux qui suivent le Christ sont dans le monde, mais ils ne sont pas du monde (cf. Jn 13, 1 ; 15, 19 ; 17,11 ; 17, 16). Rejetant les valeurs du monde séculier dans lequel ils vivent, les chrétiens s’occupent des choses de Dieu (Mc 8, 33). La vie et les enseignements des Pères et de l’Église sont là pour nous aider à traduire l’idéal évangélique dans la vie de tous les jours ; les sacrements et toute la Tradition spirituelle de l’Orthodoxie sont là pour nous soutenir dans notre démarche, nous donner force dans les luttes spirituelles de notre quotidien.

C’est dans ce cadre que se place l’enseignement de l’Église sur la mariage : il ne s’agit pas d’une vocation moindre que la vocation monastique pour ceux et pour celles qui y sont appelés, mais d’une voie vers Dieu tout aussi valable que le monachisme. De beaucoup de façons, c’est une voie plus exigeante que la voie monastique, étant plus exposée aux tentations et aux distractions de l’unique nécessaire (Lc 10, 42).

Et que dire de la troisième voie, presque inconnue du temps des Pères, mais de plus en plus répandue de nos jours, suite aux bouleversements économiques et sociaux du XXe siècle : le célibat dans le monde. En fait, si ni l’Évangile ni les Pères ne parlent spécifiquement de cet état, la considération de départ demeure la même pour le ou la célibataire dans le monde que pour les personnes mariées et les monastiques : « C’est dans sa totale exigence que l’Évangile s’adresse à tous et à chacun ».

C’est peut-être le grand théologien laïc Paul Evdokimov (1900-1970) qui de nos temps a le mieux exprimé l’unité essentielle de la spiritualité orthodoxe, dans son élaboration du « monachisme intériorisé » : « Le témoignage de la foi chrétienne dans les cadres du monde moderne postule la vocation universelle du monachisme intériorisé… En passant par la tonsure [de l’onction chrismatique], tout laïc est un moine du monachisme intériorisé soumis à toutes les exigences de l’Évangile ». Par monachisme intériorisé, expression étonnante et quelque peu déconcertante à première vue, il faut entendre ni plus ni moins que l’appel évangélique reflété dans les vœux monastiques traditionnels : la pauvreté, la chasteté et l’obéissance. C’est l’esprit ou le sens essentiel des ces trois vœux qui doit guider le chrétien, tout chrétien, dans sa vie, qu’il soit moine, laïc, marié, célibataire…


Nous avons choisi comme patrons de ces pages saint Joachim et sainte Anne, parents de la Sainte Vierge Marie. Dans la tradition de l’Église orthodoxe, il s’agit de la Sainte Famille, modèle des familles chrétiennes ; dans leur vieillesse, Joachim et Anne sont les véritables parents naturels de celle qui est devenue la Mère de Dieu. L’icône de la rencontre de Joachim et Anne, fondée sur le récit dans le livre apocryphe Le protoévangile de Jacques, montre le saint couple s’embrassant tendrement, chacun ayant reçu le message divin que leur union produira l’enfant tant voulu depuis des années. C’est l’icône du mariage, qu’on offre volontairement aux jeunes mariés à l’occasion de noces ; avec les représentations du miracle des noces de Cana, c’est la confirmation du mariage en tant que « chemin de sainteté ».


Nous ouvrons ces Pages sur le mariage et la vie chrétienne dans le monde par les principaux textes concernant le mariage dans le Nouveau Testament. Le miracle de Jésus aux noces de Cana, le premier miracle de sa vie publique dans l’Évangile de Jean, sanctifie du mariage : l’eau vouée au rituel de la purification devient le vin de l’amour, symbole eucharistique de la plénitude de l’amour dans le Christ, la base de l’enseignement de l’Église sur le mariage, symbole aussi de l’union mystique avec Dieu.

Le texte de saint Jean Chrysostome sur le mariage, extrait de son Homélie XX sur l’Épître aux Éphésiens, souligne la signification spirituelle de l’amour entre époux, puisque le mariage, suivant l’idée de saint Paul, est à l’image de l’amour entre le Christ et l’Église, ce qui fait du mariage une « petite Église ».

Parmi les théologiens orthodoxes modernes, Paul Evdokimov est sans doute celui qui s'est penché spécialement sur les fondements théologiques de la vocation des laïcs, leur rôle dans l’Église et la vie spirituelle des laïcs, célibataires ou mariés. Sous le titre « La vocation sacrée du laïc », nous avons réunis plusieurs textes sur les thèmes du sacerdoce universel de tous les chrétiens, avec une précision importante dans la notion du « sacerdoce conjugal », l’« église domestique », vue comme unité constitutive de l’Église du Christ, et la vocation du célibat laïc. On trouvera également à cette page une bibliographie des principales oeuvres de Paul Evdokimov.

Dans un article capital « Le monachisme intériorisé », Paul Evdokimov expose magistralement le lien entre les trois tentations du Christ par le Satan au désert, les trois réponses du Christ et les trois vœux monastiques, qui doivent être l’inspiration essentielle de toute vie chrétienne.

Un troisième texte de Paul Evdokimov, « L’amour et le sacrement de l’amour », un extrait de son œuvre fondamentale le Sacrement de l’amour, place l’amour conjugal dans le cadre de l’amour entre les Personnes de la Sainte Trinité : la mariage est aussi une icône trinitaire.

Le père Alphonse Goettmann nous expose, dans un langage contemporain, comment le mariage, créé par Dieu, est un véritable « chemin de sainteté » pour le couple chrétien.

Le deuxième article du père Alphonse Goettmann touche un aspect délicat et souvent méconnu ou ignoré de la vie spirituelle, le lien entre éros et mystique : éros comme l’énergie vitale de l’homme, qui le pousse à croître, à créer, à aimer et à s’unir à l’objet de son amour ; le dynamisme qui anime toute vraie mystique, toute véritable recherche de Dieu.

Olivier Clément, dans son article « L'Église orthodoxe et la sexualité », donne des aperçus sur le rôle de la sexualité dans l'« économie » du salut et de l'Église. Dans un deuxième article sur la page, le père Jean Chryssavgis présente également la perspective orthodoxe sur la sexualité.

Dans son article « Mariage, célibat et vie monastique », tiré de son livre Le mariage dans la perspective orthodoxe, le père Jean Meyendorff souligne l’importance essentielle des liens entre la vie spirituelle et le célibat.

Le court article de Horia Roscanu, « Le mystère du mariage dans l’Église d’Orient », résume en quelques mots les principaux éléments de la Tradition de l’Église d’Orient sur le mariage, à l’intention surtout de personnes non-orthodoxes.

Nous présentons les textes des trois principaux offices de mariage de l’Église orthodoxe : les fiançailles, le couronnement des époux ou le mariage proprement dit – ces deux offices étant habituellement célébrés ensemble – et l’office de secondes noces.

L’Encyclique de l’Église orthodoxe en Amérique sur le mariage (« …et les deux ne feront qu’une seule chair ») constitue un résumé de l’enseignement de l’Église sur le mariage dans le monde actuel. Le Guide pastoral du mariage qui l’accompagne s’adresse à des situations concrètes auxquelles beaucoup doivent faire face : la préparation au mariage, les mariages mixtes, le mariage hors de l’Église, le divorce, les seconds mariages, la sexualité et la vie familiale.

Nous terminons ces Pages sur le mariage et la vie chrétienne dans le monde par le Cantique des Cantiques, chant d’amour par excellence, une célébration de l’amour entre l’homme et la femme. Ce poème est vu dans la tradition hébraïque comme un chant de l’union de Dieu avec son peuple choisi, et par les exégètes chrétiens depuis les premiers siècles comme une image de l’union du Christ d’avec l’Église, et encore de l’âme humaine d’avec Dieu.

Deuxième série de textes :

Être chrétien dans le monde aujourd'hui :
Le ministère du père Cyrille Argenti

Le père Cyrille Argenti (1919-1994) :
Travailleur infatigable dans la vigne du Seigneur

par Valère De Pryck et Paul Ladouceur

Textes du père Cyrille Argenti :
Quelle spiritualité pour de jeunes laïcs ?

Vivre en chrétien et prier dans le monde
À quoi bon l’Église ?
La liturgie et la vie

La vie chrétienne dans le monde

Vivre en Église la communion avec l'autre
[Lectures introductives préparées à l’intention des participants au 8ième congrès de la Fraternité orthodoxe en Europe occidentale (Gand, Belgique, 1994)].

Célébrer pour le monde dans la paroisse
par le père André Borrely

Comment vivre notre foi chrétienne dans le monde ?
par le père Marc-Antoine Costa de Beauregard

Comment construire l’Église locale ?
par Mgr Kallistos (Ware)

Le culte divin à l’âge de la sécularisation
par le père Alexandre Schmemann


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Le mariage dans le Nouveau Testament
Saint Jean Chrysostome sur le mariage
    (Homélie
XX sur l’Épître aux Éphésiens)
La vocation sacrée du laïc par Paul Evdokiomov
Le monachisme intériorisé par Paul Evdokimov
L’amour et le sacrement de l’amour par Paul Evdokimov
Le mariage, chemin de sainteté par le père Alphonse Goettmann
Éros et mystique par le père Alphonse Goettmann
L'Église orthodoxe et la sexualité Olivier Clément et
le père Jean Chryssavgis
Mariage, célibat et vie monastique par le père Jean Meyendorff
Le mystère du mariage dans l’Église d’Orient par Horia Roscanu
Offices de mariage de l’Église orthodoxe
…et les deux ne feront qu’une seule chair
     (Encyclique de l’Église orthodoxe en Amérique)

Le Cantique des Cantiques

 



Dernière modification: 
Samedi 23 juillet 2022